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Diane Shisk

 

Personnes dirigeantes, erreurs
et la décharge des automatismes d’oppresseur

En Co-écoute, nous décidons d’être guidés par des principes parce qu’ils sont plus dignes de confiance que nos sentiments. Nos principes nous disent que tou∙te∙s les dirigeant∙e∙s commettent des erreurs et que nous devons d’abord réagir en déchargeant, puis réfléchir à la façon de les aider comme si nous étions leur écoutant∙e. Prétendre que les dirigeant∙e∙s sont parfaits et les dénoncer comme mauvais sont deux exemples de se sentir victimes et d’agir comme des oppresseurs.

ÊTRE GUIDÉS PAR DES PRINCIPES

La raison pour laquelle nous créons des principes est que nous pouvons les utiliser pour nous guider lorsque nos sentiments deviennent plus forts que notre pensée. Nous, les Co-écoutant∙e∙s, avons passé beaucoup de temps à décharger et à réfléchir ensemble pour créer nos principes, et nous savons que nous pouvons leur faire confiance. Nous avons convenu qu’ils nous guideraient. Le but de la Co-écoute est d’aider un grand nombre d’entre nous à agir selon nos principes et à continuer à penser, même lorsque l’immense quantité de blessures que nous portons, nous les humains, rend la tâche difficile.

J’utilise souvent la métaphore de la navigation par les étoiles, et non par la météo. La position des étoiles reste la même, que le temps soit orageux ou clair sur la Terre. La restimulation est comme un temps orageux à l’intérieur de nous. Nous ne pouvons pas voir les étoiles, mais nous savons qu’elles sont là et nous pouvons encore nous orienter dans leur direction jusqu’à ce que le ciel s’éclaircisse.

En Co-écoute, nous avons pris la décision commune de ne pas laisser de vieilles blessures guider nos actes et nos paroles. Nous nous entraînons à séparer nos détresses des décisions et des actions que nous voulons entreprendre. Nous nous entraînons à voir la pleine humanité des autres, à décharger ce que leur détresse nous fait ressentir et à réfléchir à la manière de les aider à se libérer.

LORSQUE LES DIRIGEANT∙E∙S COMMETTENT DES ERREURS

Lorsque les personnes dirigeantes commettent des erreurs, une partie de la douleur que nous ressentons est due au fait que nous attendons d’elles, de manière irréaliste, qu’elles ne nous fassent jamais défaut, qu’elles ne commettent jamais d’erreurs, comme si elles étaient les parents que nous n’avons jamais eus, mais que nous désirons ardemment. Comme si elles étaient les gouvernements que nous n’avons jamais eus, mais dont nous rêvons.

D’une part, nous devons remarquer les erreurs commises par les dirigeant∙e∙s et y réfléchir, non pas pour les critiquer, mais pour les aider à s’améliorer. Certain∙e∙s d’entre nous doivent se débarrasser de leur habitude de rester silencieux et passifs lorsqu’iels voient quelque chose de mal se produire, parce qu’iels n’ont pas été capables d’arrêter le mal lorsqu’iels étaient jeunes. Certain∙e∙s d’entre nous doivent se débarrasser de leur habitude d’ignorer les erreurs parce qu’iels veulent croire que leurs dirigeant∙e∙s et leur mouvement sont parfaits, et qu’iels ont peur lorsqu’iels découvrent que ce n’est pas le cas. Certain∙e∙s d’entre nous doivent cesser de vouloir faire taire quiconque est mécontent∙e d’un∙e dirigeant∙e.

D’un autre côté, en tant que Co-écoutant∙e∙s, nous avons pris la décision de soutenir nos personnes dirigeantes pour qu’elles fassent de leur mieux, en utilisant les outils de la Co-écoute lorsqu’elles commettent des erreurs. Notre politique consiste à organiser suffisamment de séances pour pouvoir rester dans le rôle d’écoutant∙e∙s avec elles, réfléchir à la façon dont elles ont été blessées et les aider à décharger. Certain∙e∙s d’entre nous ont besoin d’évacuer beaucoup de rage et de chagrin sur la façon dont l’oppression nous a blessés, nous et notre peuple, pour être capables de bien réfléchir aux dirigeant∙e∙s qui commettent des erreurs dans notre direction et d’interrompre de façon réfléchie leurs automatismes d’oppresseur. Certain∙e∙s d’entre nous ont besoin de se libérer de l’impuissance qui leur donne l’impression que la seule chose qu’iels peuvent faire est de dénoncer publiquement les torts de quelqu’un. Lorsque nous n’avons pas complètement guéri de l’injustice que nous avons vécue et connue dans notre jeunesse, il peut nous sembler important de dénoncer ou de punir les gens.

PRÉTENDRE QUE LES PERSONNES DIRIGEANTES SONT PARFAITES

Prétendre que les personnes dirigeantes sont parfaites et les dénoncer comme étant terribles sont deux exemples de la façon dont nous pouvons nous sentir victimes mais agir comme des oppresseurs. Aucun de ces automatismes ne permet aux personnes dirigeantes d’être pleinement humaines. Ni l’un ni l’autre n’aide les dirigeant∙e∙s à s’améliorer dans leur travail. Les temps actuels sont troubles et ils s’aggravent, et nous n’avons pas le temps de décharger de toutes les blessures avant d’agir. Nous devons continuer à agir selon nos principes, même si nous sommes blessés et restimulés.

LA PUISSANCE DE LA DÉCHARGE DES AUTOMATISMES D’OPPRESSION

L’un des moyens les plus puissants de faire ce qui précède est de passer plus de temps en séance à décharger les automatismes d’oppression que nous portons tou∙te∙s en nous. Même si nous n’avons pas le temps de nous débarrasser de toute la douleur liée à la façon dont nous avons été victimes, nous pouvons nous empêcher de diriger cette douleur vers d’autres personnes qui sont tout aussi blessées que nous. Apprendre et enseigner cela est l’un des moyens les plus rapides de créer le changement dont nos sociétés ont besoin.

Aurora Levins Morales

Maricao, Porto Rico

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Last modified: 2024-05-01 18:28:56+00