Parler aux enfants
d’événements tragiques
 

Lac Rose, Senegal • Erin Huang-Schaffer, 2016

De nombreux enfants (et deux adultes) ont récemment été tués lors d’une fusillade dans une école primaire aux États-Unis. Voici quelques réflexions sur la façon de parler aux enfants lorsque des événements difficiles se produisent. Elles sont basées sur les écrits de Patty Wipfler, ancienne Personne de Référence Internationale de Libération pour les parents

1. Il n’y a aucune raison pour que les jeunes personnes soient exposées à ce qu’on appelle les infos dans nos sociétés oppressives. Ça effraie les jeunes personnes (et les adultes aussi) et leur donne une image déformée et angoissée du monde. Éloignez votre enfant de la télévision, de la radio, d’Internet et des journaux qui pourraient l’exposer à des choses effrayantes.

2. Organisez vous-même des séances de Co-écoute sur les mauvaises nouvelles. Nous sommes tous affectés. Il est bon d’être proches d’autres adultes et de décharger sur les choses difficiles. Si vous vous sentez poussés à regarder la télévision pour connaître tous les détails d’un événement horrible, c’est le signe que vous avez besoin d’une séance. Faites une mini-séance même si vous ne sentez pas que vous en avez besoin. Pleurez, riez ou tremblez. Appelez d’autres parents et établissez des liens avec eux.

3. Vous pouvez parler à votre enfant d’âge scolaire d’un événement tragique avant qu’iel ne le découvre dans la culture générale. Vous pouvez en parler brièvement, sans détails graphiques, avec bienveillance et en étant connectés. Vous pouvez être proches de votre enfant tout en lui disant que vous êtes tristes de ce qui s’est passé. Vous n’avez pas besoin des reporters distants «objectifs».

4. Vous pouvez enseigner la théorie de base de la Co-écoute à une jeune personne de n’importe quel âge. Vous pouvez le faire tous les jours, en plus d’en parler lorsqu’un événement tragique se produit. Quand un∙e enfant grandit et pose plus de questions, vous pouvez lui donner une image plus détaillée de la réalité.

Vous pouvez partager l’image que nous nous faisons du monde dans la Co-écoute, à savoir qu’il est bienveillant. Même si des choses difficiles se produisent, de nombreux autres actes d’amour, d’attention et de courage se produisent partout dans le monde, en permanence. Vous pouvez expliquer la bonté humaine et les automatismes de détresse, comment les gens guérissent de la détresse, comment les enregistrements de détresse fonctionnent lorsque les gens n’ont pas eu l’occasion de guérir, ainsi que la libération et l’oppression. Vous pouvez expliquer que lorsque quelqu’un fait quelque chose de blessant, c’est parce qu’il a été blessé et qu’on l’a laissé seul avec ça.

5. Vous pouvez rassurer votre enfant en lui disant que de nombreux adultes essaient de trouver une solution pour qu’aucune personne, aucun groupe de personnes ou aucun pays ne soit blessés. Vous pouvez lui dire que chaque personne et chaque culture sont précieuses et adorables, que nos sociétés évoluent au fil du temps et que nous pouvons prendre les choses en main avec notre intelligence et guider le processus.

Votre enfant se servira de ce que vous dites, et de sa propre expérience, pour construire sa propre image de la réalité. Vous devez le/la soutenir dans ce processus.

6. Les communautés et les relations sont rassurantes pour tout le monde. Bâtissez une communauté autour de vous et de votre famille. Faites-vous beaucoup d’amis parmi celles et ceux qui ont des origines culturelles, raciales et sociales différentes de celles de votre famille. Faites-vous également des ami∙e∙s parmi les personnes de même origine.

7. Contredisez l’impuissance. Amenez votre enfant à réfléchir à ce que votre famille pourrait faire pour améliorer les choses. Faites ces choses en famille. Écrivez une lettre, assistez à une veillée, faites du bénévolat, participez à une manifestation ou signez une pétition avec votre enfant. Ça leur donnera une perspective pleine d’espoir et contredira les sentiments de découragement et d’impuissance.

Soyez des modèles en vous opposant au racisme, au classisme, à l’antisémitisme, au sexisme, à l’oppression des jeunes personnes, à l’homophobie, à l’oppression des personnes invalides, à la dégradation de l’environnement et aux autres oppressions et injustices.

8. Lorsque votre enfant remarque les sentiments d’autres personnes à propos d’un événement tragique, passez plus de temps particulier avec lui/elle. Iel a besoin de sentir votre sollicitude et votre proximité pour décharger. Des jeux actifs et débridés avec beaucoup de contacts les aideront à rire. Le rire jette les bases pour que des sentiments plus lourds puissent émerger et être déchargés.

Ne soyez pas surpris si votre enfant fait d’intenses séances (très probablement pas pendant le temps particulier) sur des petites choses qui sont un prétexte pour travailler sur l’événement tragique. N’évoquez pas l’événement tragique si sa séance porte sur une petite chose. Au contraire, écoutez ce que votre enfant dit et suivez son esprit.

9. N’oubliez pas que vous êtes de bons parents. Appréciez le travail important que vous faites. Vous n’êtes pas tenus de le faire parfaitement.

Marya Axner

Personne de Référence Internationale

De Libération pour le Parents

Somerville, Massachusetts, États-Unis

Reproduit du forum de la Co-écoute

pour les dirigeant∙e∙s des parents

Traduit de l’anglais par Régis Courtin


Last modified: 2023-03-08 18:08:50+00