"Je choisis de vivre pleinement ma vie"

J'ai eu l'occasion de perdre de nombreux êtres chers pendant la deuxième vague du COVID-19, et j'ai failli perdre ma femme à cause d'une collision frontale avec un camion alors qu'elle revenait d'un des enterrements. À un moment donné, j'ai perdu deux tantes et deux frères en l'espace de quatre semaines. Ma communauté de Co-écoute a organisé des séances à sens unique pour moi au niveau local et international. La réponse a dépassé toutes les attentes. Cela seul était une contradiction suffisante [à la détresse]. Je suis si fier d'être membre de cette organisation.

L'organisatrice de mes séances intensives a transcrit certaines des réévaluations que j'ai partagées avec elle pendant et après ces séances et a suggéré que cela pourrait être utile pour Present Time. Les voici :

Il est possible de changer le "script" installé dans notre esprit en raison de notre passé et des expériences de notre petite enfance.

Il existe un fossé entre le monde dans lequel je veux vivre, mes pensées et ce que je pense être possible de réaliser.

Dans ce fossé, j'ai réalisé que je devais revenir en arrière et réécrire le script qui est imprimé dans mon esprit. Je dois revenir en arrière et donner à l'enfant, le jeune B_, les informations qu'il n'a pas reçues : « Tu es bon, puissant et aimé. » 

Je peux retourner vers lui et lui dire : « Peut-être, peut-être que la raison pour laquelle tu as atterri là, c'était que tu pouvais réécrire le scénario et partager ça avec d'autres personnes. » Nous pouvons réécrire nos scénarios et prendre en charge le monde. Le monde est en désordre, le capitalisme s'effondre, le COVID-19 détruit nos commu­nautés. Nous, dans la Co-écoute, sommes la ressource, nous avons des informations que les autres n'ont pas.

Nous ne pouvons pas continuer à jouer petitement. Nous avons tous une chance maintenant de faire la différence, de prendre le leadership.

Je me sens motivé. Je ne doute pas qu'il soit bon d'être en vie. C'est bon d'être en vie. Tous mes proches disparus me sourient de là-haut. Ils ne sont pas tristes d'être morts. Ils sont heureux que je sois en vie ; ils m'encouragent. Ma mère est si heureuse — elle espère et loue le fait que je sois capable de comprendre tout ça. J'étais destiné à voler ; je peux voler. Elle m'aimait suffisamment. Si elle avait su comment faire, elle aurait fait plus, elle m'aurait aidé, elle m'aurait dit que je suis bien tel que je suis, que je suis aimé.

Mon père n'est pas en colère contre moi. Dans mon esprit, il me soutient aussi. Il n'est pas triste pour la connexion que nous n'avons pas eue. J'ai été en colère contre lui pendant longtemps. Ça m'a permis d'avancer suffisamment et de vivre. J'étais en colère qu'il ne soit pas là. Ma grand-mère m'a tant appris. Ça m'a permis de reconnaître plus facilement que c'était les gens autour de moi qui étaient confus.

Revenir en arrière et réécrire tous les scénarios est nécessaire. Ça ne me sert à rien de m'accrocher aux anciens scripts. Mais ça exige de croire fermement que la réalité bienveillante est vraie pour chacun⋅e d'entre nous. Et la volonté de revenir en arrière et de persuader le petit enfant qu'en dépit de tout ce qu'il a dû traverser, la réalité bienveillante est toujours aussi réelle.

Le deuil est un processus continu. Je dois faire le deuil des décès précoces et des décès actuels, et pourtant la vie continue.

Je suis en vie ; il est bon d'être en vie. Et je choisis de vivre pleinement ma vie.

B_
Eswatini

Traduit de l'anglais par Régis Courtin


Last modified: 2023-03-15 17:29:04+00