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Diane Shisk

 

Réflexions sur le développement

— Karl Lam Personne de Référence Régionale pour Cambridge, Herts, Beds, Bucks, et Norfolk, en Angleterre Burwell, Cambridgeshire (Angleterre)

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J'ai réfléchi aux raisons pour lesquelles notre Région1 ne s'est pas beaucoup développée ces vingt dernières années. Je pense que ce manque de développement a eu un effet pénible sur chacun-e d'entre nous personnellement, et sur nous tous en tant que Communauté de Co-écoute.

Je pense aussi que si nous n'avons pas enseigné la Co-écoute avec succès à de nombreuses nouvelles personnes, alors nous ne savons pas vraiment que la Co-écoute est “vraie” (en d'autres termes, qu'elle est une description exacte de la réalité). Nous croyons peut-être qu'elle est vraie, mais c'est différent. Sans la connaissance directe acquise par l'expérience, nous pouvons finir par avoir avec la théorie et la pratique une relation “basée sur la foi”. Nous pouvons avoir un sentiment de confort quand nous sommes avec des gens qui croient aussi dans la Co-écoute, mais nous n'avons pas une confiance ferme dans le fait que la Co- écoute fonctionne, ou qu'on peut la faire fonctionner, pour tous les humains.

La croissance est un signe de succès, et le manque de croissance signifie une sorte d'échec. Qu'avons-nous fait face à cet échec ? Nous avons investi toutes nos énergies dans des activités qui marchent bien au sein de la Communauté existante (et nous avons fait de belles choses). Nous n'avons pas beaucoup cherché à comprendre les raisons de notre faible croissance parce que c'est trop décourageant.

Bien sûr, du fait que le découragement a été ignoré et éclipsé, et que nous n'avons pas travaillé dessus, les choses n'ont pas bougé. Je pense que ce découragement caché (qui ressemble à du faux-semblant) peut nous créer des difficultés encore plus grandes pour communiquer la Co-écoute de manière correcte et sans ressentir une urgence.

Donc, j'ai compris qu'il est important que nous nous développions — pas simplement pour répandre les idées de la Co-écoute, ce qui est important, et pas simplement en tant que Communauté, mais de façon à ce que chacun-e de nous en tant qu'individu bâtisse la Co-écoute autour de soi. Si nous ne faisons pas cela, nous n'aurons pas des Communautés rassemblant des gens ayant confiance dans leur compréhension de la Co-écoute. Nous ne ferons pas du bon travail de Co-écoute dans nos Communautés, et nous ne répandrons pas la Co-écoute en dehors de nos Communautés déjà établies.

Qu'est-ce qui a rendu cette croissance si difficile ? Quelle erreurs avons-nous commises — de manière répétée ? J'ai commencé à regarder les cas où j'ai réussi à faire venir de nouvelles personnes dans la Co- écoute, et ceux où j'ai échoué.

J'ai pu voir que là où j'ai réussi, j'avais déjà une relation avec la personne. Cette personne faisait partie de ma vie de façon très significative. Là où j'ai échoué, je n'avais pas cette sorte de relation. Non seulement ça, je n'avais aucune idée de la façon d'établir cette sorte de relation.

CE QUI A MARCHÉ

En partie, ce qui a marché c'était d'avoir plus que des contacts organisés de type Co-écoute avec les gens. Dans le cas des personnes qui faisaient partie de mes amis proches ou de ma famille, j'avais beaucoup de contacts avec elles en dehors des activités organisées de Co-écoute. Dans ces contacts “ordinaires”, nous étions ouverts, attentionnés, et nous utilisions les idées de la Co-écoute de manière délibérée pour orienter nos interactions et nos objectifs au cours des moments passés ensemble. Une autre façon de l'exprimer, c'est que nous “vivions” la Co-écoute.

Une autre chose qui a marché, c'est que je faisais grossir ce groupe de personnes une à une, si bien que chaque nouvelle personne se joignait à un groupe de gens qui utilisaient déjà la Co-écoute avec succès dans leurs relations personnelles. Les nouvelles personnes commençaient leur apprentissage de la Co-écoute d'une façon différente de celle qui consiste simplement à participer à une classe fondamentale hebdomadaire.

Un signe supplémentaire de la réussite de cette stratégie (accidentelle) était que les gens que j'amenais dans le groupe, à leur tour, réussissaient à amener d'autres personnes de leur entourage.

CE QUI N'A PAS MARCHÉ

Pourquoi est-ce que j'ai échoué quand j'ai essayé de faire connaître la Co-écoute à des personnes avec lesquelles je n'avais pas de relation proche et engagée — et avec lesquelles je ne savais pas comment en établir une ? Beaucoup de Co-écoutant-e-s ont des difficultés à parler de la Co-écoute aux gens de leur entourage, en grande partie à cause de l'oppression de la “santé mentale”, mais je m'étais fait une fierté d'être capable d'en parler à presque tous ceux et toutes celles que je rencontrais. En fait, il m'était presque difficile de ne pas en parler. À présent, je peux voir que je parlais de la Co-écoute parce que je ne savais pas comment parler d'autre chose. Je ne savais pas comment établir une relation qui ne contienne pas la Co-écoute. J'avais beaucoup travaillé à me rapprocher des gens au sein de la Communauté — au travers d'un travail important de libération dans des ateliers, des classes, des séances de Co-écoute. Apprendre à être proche dans le cadre de la Co-écoute m'avait été utile de bien des façons, et m'avait montré ce qui était possible entre êtres humains, mais dans une certaine mesure, cela s'était substitué à l'établissement de relations proches dans mes autres cadres de vie. Face à une personne dont je n'étais pas déjà proche, je m'efforçais de diverses manières de l'amener dans la Co-écoute, parce qu'alors nous aurions une formule toute faite qui nous permettrait d'être proches et je n'aurais pas à affronter mes difficultés à ce sujet. Je recherchais une façon de me faire des amis avec lesquels je pourrais communiquer et m'entendre sur des sujets difficiles, comme le racisme et le classisme.

Maintenant, je comprends pourquoi je n'ai pas très bien réussi avec ces personnes ! Il fallait que je cesse de promouvoir inconsidérément la Co-écoute comme la seule voie possible pour être proche, et qu'au lieu de ça j'enseigne uniquement la Co-écoute sur la base d'une relation proche en cours de développement.

Quand j'ai exposé ces idées aux dirigeant-e-s de ma Région, beaucoup m'ont dit qu'ils ou elles avaient fait la même erreur. Je pense que nous avons tous beaucoup de travail à faire pour former des relations personnelles proches.

Une façon pour moi d'exprimer tout ça, c'est de dire “la croissance de la Co-écoute, ce n'est pas tellement d'y amener des gens, mais plutôt d'y amener des relations en plein développement, qui sont vivantes, et pour lesquelles on s'est battu.”

1 Une Région est une subdivision des Communautés Internationales de Réévaluation par la Co-écoute, habituellement constituée de plusieurs Secteurs (les Communautés locales de Co-écoute).

Paru dans Present Time N°169 (Octobre 2012)

Traduit par Régis Courtin


Last modified: 2019-05-02 14:41:35+00